En présence de clause recettes, l'administration peut considérer que l'activité exercée s'analyse comme une forme de co-exploitation de l'activité du locataire.
Autrement dit, avec une clause recettes, l'administration considère que le bailleur participe à l'activité du locataire et doit relever du même régime fiscal.
En présence de clause-recettes, quand le locataire est un exploitant hôtelier, le propriétaire doit être taxé comme un exploitant hôtelier.
En fait, la requalification n'est pas automatique. La clause recettes est un élément qui peut justifier la requalification. L'administration le précise dans sa doctrine sur la définition de la location meublée :
"La location à un exploitant qui, sous sa seule responsabilité, effectue les prestations de service inhérentes à son activité hôtelière ou para-hôtelière, de lots de copropriété comprenant des parties privatives et des parties communes constituées, outre les dépendances habituelles (hall, parking, voie d'accès …), d'espaces nécessaires à cette activité (salle de restauration, local pour le personnel, salle médicalisée…), relève du régime fiscal de la location meublée lorsque :
- (…)
- la location ne constitue pas pour le bailleur le moyen de participer à la gestion ou aux résultats de la société d'exploitation (les formules de rémunération du bailleur se référant ou combinant des données propres à l'activité, au chiffre d'affaires ou aux résultats de l'entreprise locataire peuvent constituer des moyens de participation à la gestion ou aux résultats. (…") (BOI-BIC-CHAMP-40-10-20120912).
La simple existence d'une clause recettes ne suffit pas à justifier une telle requalification (voir par exemple TA Amiens 15-12-2016 n° 1402818 : RJF 5/17 n° 410).
Mais d'autres indices supplémentaires de la coexploitation peuvent entraîner la requalification, notamment des associés communs entre la société bailleresse et la société locataire.
Je propose de citer les principales décisions concernant cette problématique.
"Les profits tirés de locations d'immeubles nus ayant pour effet de faire participer le bailleur à la gestion ou aux résultats de l'entreprise commerciale exploitée par le preneur sont rangés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.
Il en est notamment ainsi lorsque le loyer est calculé en fonction du bénéfice ou du chiffre d'affaires du locataire ou encore lorsqu'une clause du bail implique une participation du propriétaire aux résultats de l'entreprise locataire (CE 18 juillet 1973, n° 82577).
Il en est de même lorsque le bailleur poursuit lui- même une activité commerciale qui constitue un ensemble économique étroitement intégré avec les activités de son ou de ses locataires (CE 29 avril 1977, n° 275, Plén)."
BOI-RFPI-CHAMP-10-30-2012 09 12 n°80.
Exerce une activité commerciale le contribuable qui donne en location des immeubles servant à l' exploitation d'une station thermale à une compagnie locale des eaux thermales dont le conseil d'administration est d'ailleurs présidé par le conjoint du bailleur, moyennant un loyer fixe et une redevance annuelle égale à 30 % des recettes brutes perçues par la compagnie, laquelle, au surplus, s'est engagée à verser, en toute hypothèse, au titre de cette redevance, une somme au moins égale, chaque année, à 80 % de celle versée l'année précédente. Les conditions très particulières de la location accordant en fait la plus grande partie des profits réalisés par la compagnie au bailleur et l'associant étroitement à la gestion de la station thermale, la location constitue un mode particulier d'exploitation par le bailleur du commerce installé dans l'immeuble loué, nonobstant la circonstance qu'il ne serait pas propriétaire du fonds de commerce et que le bail n'aurait pas comporté la location d'installations suffisantes pour permettre le fonctionnement normal de la station.
CE 12 juillet 1969 n° 75738, 7e et 9e s.-s. : Dupont 1969 p. 378 ; D. adm. 4 F-114 n° 176, 7 juillet 1998.
Relève de l'exercice d'une activité commerciale la location d'un immeuble consentie moyennant un loyer égal à 2 % du chiffre d'affaires de la société locataire, alors que le bailleur, qui est président-directeur général et détient la quasi-totalité du capital de cette société, a en fait renoncé à la perception de certains des loyers qui lui étaient dus pour pallier les difficultés financières de la société locataire et a ainsi participé aux résultats de l'entreprise locataire.
CE 13 mars 1974 n° 90766, 8e et 9e s.-s. : Dupont 1974 p. 249 ; D. adm. 4 F-114 n° 177, 7 juillet 1998.
Est réputée exercer une activité commerciale une société civile immobilière qui donne à bail à l'un de ses membres les locaux nus destinés à l'exploitation d'un fonds de commerce (pharmacie en l'occurrence) moyennant un loyer annuel comportant une part fixe de 210 000 F et une part variable égale à 5 % du chiffre d'affaires. Cette société est passible de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 206-2 du CGI. Compte tenu de sa participation importante aux résultats, la société bailleresse a entendu participer, sous le couvert de la location consentie, à la gestion et aux résultats de l'entreprise commerciale du preneur.
CE 28 mai 1984 n° 36308, 7e et 9e s.-s. : RJF 7/84 n° 817 ; D. adm. 4 H-1131 n° 32, 1er mars 1995.
Exerce une activité commerciale une société civile qui donne en location à une société anonyme ayant les mêmes associés majoritaires des locaux à usage de restaurant moyennant des loyers dépendant des résultats de l'activité locataire que la société civile a d'ailleurs renoncé à percevoir en totalité durant la période en litige. Constitue également une activité commerciale la location par la société civile à une société de publicité d'un panneau d'affichage moyennant un loyer fixe ainsi qu'une part variable suivant l'occupation du panneau, laquelle a excédé la part fixe durant les années en litige.
CE 28 septembre 1984 n° 40666, 8e et 9e s.-s. : RJF 11/84 n° 1311 ; D. adm. 4 H-1131 n° 33, 1er mars 1995.
La location d'un ensemble immobilier comportant des cuves de stockage d'huiles végétales consentie par une société civile immobilière moyennant un loyer proportionnel aux quantités de produits stockés a pour effet d'associer cette société aux aléas inhérents à l'activité commerciale de stockage. La seule circonstance que la société civile immobilière et l'entreprise preneuse aient des associés communs n'est pas de nature à justifier le caractère commercial de la location, mais cette qualification résulte de la participation du bailleur aux résultats du locataire.
CE 29 décembre 1995 n° 137244, 9e et 8e s.-s., Société civile immobilière de stockage : RJF 2/96 n° 179.
Un bailleur ne peut pas être considéré comme participant aux résultats de l'entreprise locataire lorsque le loyer prévu par le bail est fixe. Il en est ainsi même s'il a été amené à consentir une diminution de ce loyer à la suite d'un incendie des biens loués. Par ailleurs, la circonstance que le principal actionnaire de la société locataire soit également l'un des associés majoritaires de la société civile bailleresse ne suffit pas à donner au bail conclu le caractère d'un bail commercial.
CE 2 décembre 1988 n° 43745, 8e et 7e s.-s., SCI Rungis Morangis : RJF 2/89 n° 159.
Doit être considérée comme commerciale l'activité d'une société civile qui loue des locaux aménagés par elle pour l'installation d'une bombe au cobalt exploitée par une société anonyme locataire, la location étant consentie moyennant un loyer fixé à 35 % du bénéfice annuel de la société locataire calculé après amortissement de cette installation, payable par acomptes trimestriels définitivement acquis et s'élevant à 10 % des recettes brutes, honoraires médicaux exclus. Un tel mode de calcul du loyer entraîne la participation de la société bailleresse aux résultats commerciaux de la société locataire.
CE 3 mars 1976 n° 94802, 7e et 9e s.-s. : RJF 5/76 n° 223, BO 4 H-5-76 ; D. adm. 4 F-114 n° 178, 7 juillet 1998 ; D. adm. 4 H-1131 n° 31, 1er mars 1995. CE 3 mars 1976 n° 94801, 7e et 9 e s.-s. : RJF 5/76 n° 236.
Exerce une activité commerciale une société immobilière propriétaire d'un immeuble commercial à usage de casino, comprenant notamment un restaurant, un théâtre et des salles de jeux et donné par elle en location à une autre société chargée de l'exploiter conformément à sa destination. En l'espèce, si la plus grande partie des meubles meublants indispensables au fonctionnement du casino ont été fournis par la société locataire et si, de ce fait, la location ne peut être regardée comme portant sur un immeuble muni de tout le mobilier nécessaire à son exploitation, ledit immeuble comporte, et comportait dès l'origine, des installations techniques complètes, en ordre de marche, telles que machineries de scène, glacières de restaurant, sous-station électrique, appareils élévateurs, moyens de ventilation et de chauffage. En outre, au cours de la période litigieuse, si la partie fixe du loyer était restée fixée à un chiffre assez faible, la partie mobile était calculée à raison de 18 % du montant des bénéfices de la société locataire, celle-ci prenant également en charge certaines des dépenses incombant normalement au propriétaire. Enfin, une convention annexe stipulait que deux sièges au conseil d'administration de la société exploitante seraient réservés à la société immobilière bailleresse.
Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances très particulières, la location consentie par cette société l'associait étroitement à la gestion du casino et aux profits réalisés et constituait de ce fait un mode particulier d'exploitation du commerce installé dans les bâtiments loués, exploitation correspondant à l'exercice d'une profession de nature commerciale.
CE 15 juillet 1960 n° 37664 : BOCD 1961-II-1472 ; D. adm. 4 F-114 n° 188, 7 juillet 1998.
Exerce une activité commerciale l'exploitant d'un sauna qui donne en location à des kinésithérapeutes exploitant à titre personnel une salle de massage et une salle de rééducation moyennant le reversement de 40 % de leurs honoraires : CE 27 juillet 1984, n° 39942.
Présente un caractère commercial la location par une société d'un terrain sur lequel elle a entrepris des travaux de gros-œuvre pour le rendre propre à recevoir un golf, consentie au profit d'une association sportive, dont le président est un membre influent de la société bailleresse, qui a aménagé et géré le golf dès lors que :
- la destination du terrain était imposée au preneur ;
- les redevances à verser étaient calculées en pourcentage du montant des cotisations des joueurs.
CE 16 juin 1982 n° 24192, 7e et 8e s.-s. : RJF 8-9/82 n° 781.
Présente un caractère commercial la location de terrains nus consentie par une SCI à une SA dans les conditions suivantes :
- le bail était conclu moyennant un loyer correspondant à 0,5 % du chiffre d'affaires du preneur, avec un minimum annuel de 30 000 F et attribution au bailleur en fin de bail des locaux réalisés par le preneur ;
- les deux sociétés étaient entre les mains des mêmes associés.
Par suite, la SCI, qui doit être regardée comme participant de manière indirecte aux résultats du supermarché exploité par la SA, est passible de l'impôt sur les sociétés.
CE 9 décembre 1991 n° 65556, 8e et 7 e s.-s., Route de Brinay : RJF 2/92 n° 190.
N'est pas de nature à conférer un caractère commercial à la location d'un ensemble de locaux dépourvus de tout élément d'exploitation une clause de variation du loyer en fonction des ventes annuelles réalisées par le locataire, le loyer devant être au moins égal à un certain montant. Une telle clause ne saurait, à elle seule, faire regarder le bailleur comme ayant participé effectivement à la gestion et aux résultats de l'entreprise exploitée dans les locaux loués.
CE 30 juin 1967 n° 70037, 9e s.-s. ; D. adm. 4 F-114 n° 180, 7 juillet 1998.
Un arrêt du Conseil d'Etat (CE 11 décembre 2009 n° 301504, 8e et 3e s.-s., SCI Aristide Briand : RJF 3/10 n° 211) a précisé que :
"Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SCI Aristide Briand, dont la gérante, Mme Guilpain, détenait 95 % des parts en usufruit, a donné à bail à la société Verneuil Distribution, dont le capital social était détenu pour l'essentiel par Mme Guilpain, des locaux nus, où a été exploité un supermarché, et un terrain, sur lequel était édifiée une station de distribution de carburant ; que les deux sociétés avaient donc un associé commun majoritaire ; que les locations étaient consenties moyennant un loyer correspondant à 0,8 % du chiffre d'affaires et un versement annuel garanti de 48 000 F ; qu'enfin, les loyers versés par la société Verneuil Distribution représentaient 20 % des recettes de la SCI Aristide Briand ; que, dès lors, la SCI Aristide Briand doit être regardée comme participant de manière indirecte aux résultats de la société Verneuil Distribution ; qu'ainsi, son activité de location, de nature commerciale, entraînait l'assujettissement de la société à l'impôt sur les sociétés au titre des années 1994 à 1997..."
Quel est le régime fiscal du propriétaire qui donne mandat à un exploitant hôtelier de gérer son bien ?
Si le propriétaire donne mandat à un exploitant hôtelier et que cet exploitant agit au nom du propriétaire pour gérer le bien, le régime du propriétaire est celui d'un exploitant hôtelier.
Mais si le mandat garantit un revenu fixe au propriétaire et le couvre des risques d'exploitation, il peut être requalifié en location (CE 16 octobre 2009 n° 301235, 10e et 9e s.-s., Chwartz : RJF 1/10 n° 6).
Paul Duvaux est un expert en fiscalité depuis 30 ans, avec bientôt 10 ans de spécialisation dans le meublé. Il est l'auteur des contenus du site, apportant ses connaissances et son expertise pour informer les futurs lecteurs sur les dernières tendances et les meilleures pratiques en matière de location meublée. Avec plus de trois décennies d'expérience dans le domaine de la fiscalité, Paul Duvaux est un expert incontesté en la matière.